l'étrange et sublime lee morse est une comète, une mutante, l'une de ces étoiles sensuelles qui ne cesseront jamais de briller: musicalement, c'est un croisement impossible entre billie holiday et jimmie rodgers (son étrange yodel en a d'ailleurs découragé plus d'un). si les drogues et l'alcool ne l'avaient plus d'une fois fait rater des occasions, et dévier de sa route, elle aurait sûrement été une louise brooks de la chanson populaire ... regardez ... écoutez ... c'est presque trop beau, non?
lee morse/he's a good man to have around/love me
lee morse/a million me's (1930)
mercredi 12 novembre 2008
mardi 11 novembre 2008
depuis l'aube des temps (et l'aube est tout ce qui m'intéresse, n'est-ce pas), il n'y a que la voix ... les instruments se sont contentés, en bien ou en mal, de la copier
chez les chanteurs américains, depuis l'aube des temps, on apprend à chanter ... chacun amène sa pierre, sa technique, son idée ... c'est ce que j'appelle, faute de mieux, le feeling (en français, l'émotion)
bob dylan's latest reincarnation (kanata, november 2008),dans la toute dernière réinterprétation de l'une de ses plus belles chansons, don't think twice, it's alright (les dessins et peintures sont tirées de la série de dylan intitulée drawn blank)
bob dylan's latest reincarnation (kanata, november 2008),dans la toute dernière réinterprétation de l'une de ses plus belles chansons, don't think twice, it's alright (les dessins et peintures sont tirées de la série de dylan intitulée drawn blank)
c'est tout ce qui compte pour moi, la charge sentimentale qu'une voix procure à travers une technique: leroy gourhan en ferait mieux que moi l'archéologie savante (gestes, outils, émotion ....) ....
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GOD SAID TO ABRAHAM KILL ME A SON ....
Cette phrase là, « Dieu dit à Abraham : tue moi un fils », n’arrête pas de me tracasser. Elle est de Dylan, c’est la première phrase de Highway 61 Revisited, pas n’importe quelle chanson. Dylan n’arrête pas de me tracasser lui aussi. Il est partout, il est nulle part. Plus il apparaît, plus il disparaît. Je ne cesse d’écouter son dernier bootleg, à chaque fois il me glisse des mains : une fois il est génial, la fois suivante il me tape sur les nerfs, la fois d’après je me dis qu’il aurait fallu réunir les quinze meilleurs titres sur un seul disque (les plus lents, les plus désossés, les plus désarticulés) et la maison Dylan s’en serait sorti plus dignement, avec plus d’élégance en tout cas. La seule chose à laquelle je ne cesse de revenir, ce sont les notes de pochette de Larry « Ratso » Sloman, un drôle de type sorti tout droit d’un dessin de Crumb et dont le livre, On The Road With Bob Dylan, est le seul témoignage à la première personne qui donne de Dylan un portrait convaincant: Ratso aime Dylan d’amour mais Dylan fait à peine mine de le voir, il le laisse se dépêtrer avec son staff, il le laisse se faire sadiser par son road manager … mais au fond, il l’aime bien.
Pourquoi je vous parle de Larry Sloman, de Dylan, d’Abraham, au fait ? C’est que je pense à Leonard Cohen. La première chanson de lui qui m’ait marqué (et peut être la seule que j’aime), c’est Story of Isaac. Quand j’ai écouté ça, on était en 1969, je ne savais rien de moi, rien de la vie, rien du judaïsme. On peut dire que j’ai commencé par là.
J’ai commencé par cette chanson, Story of Isaac, qui commençait par ça : « The door it opened slowly/My father he came in/I was nine years old/And he stood so tall above me/His blue eyes they were shining/And his voice was very cold/He said : "I've had a vision/and you know I'm strong and holy/I must do what I've been told."
Un père plus grand que son fils, les yeux brillants, la voix froide, qu’est-ce que ça pouvait bien vouloir dire ? Et puis : « So he started up the mountain/I was running, he was walking/And his axe was made of gold. » Une hâche d’or, on était où, là ? Plus loin, la chanson parlerait d’autels sur lesquels on sacrifie des enfants, elle parlerait de dieux et de démons, et de la main du père qui tremble sous la vision de la parole (« the vision of the word »). Poésie, hermétisme ; c’était presque du Blanchot pour moi.
Et puis j’ai relu le titre de la chanson : Story of Isaac, et dans un dictionnaire j’ai appris qu’Isaac était le fils d’Abraham, ce fils que Dieu lui ordonne un jour de sacrifier. J’étais si peu juif que je ne savais rien de tout ça. La monotonie hantée de cette chanson m’avait juste obligé à me poser une ou deux questions. Cet homme qui chantait, ce vieil Isaac qui se rappelait du moment où, enfant, la main tremblante du père allait s’abattre sur lui, juste avant que …
Quand Dylan raconte ça, Dieu qui ordonne à Abraham de lui tuer un fils, c’est juste une bonne blague pour lui, un truc vu de l’extérieur pour faire rire son copain Ginsberg, et rien d’autre. Pour Leonard Cohen, il s’agit d’une expérience intérieure, une expérience vécue. D’un côté, c’est la poésie du dedans. De l’autre, chez Dylan, celle du dehors. Vous voyez, oui ou non ?
(à lire dans le prochain rolling stone)
leonard cohen/story of isaac
The door it opened slowly,
my father he came in,
I was nine years old.
And he stood so tall above me,
his blue eyes they were shining
and his voice was very cold.
He said, "I've had a vision
and you know I'm strong and holy,
I must do what I've been told."
So he started up the mountain,
I was running, he was walking,
and his axe was made of gold.
Well, the trees they got much smaller,
the lake a lady's mirror,
we stopped to drink some wine.
Then he threw the bottle over.
Broke a minute later
and he put his hand on mine.
Thought I saw an eagle
but it might have been a vulture,
I never could decide.
Then my father built an altar,
he looked once behind his shoulder,
he knew I would not hide.
You who build these altars now
to sacrifice these children,
you must not do it anymore.
A scheme is not a vision
and you never have been tempted
by a demon or a god.
You who stand above them now,
your hatchets blunt and bloody,
you were not there before,
when I lay upon a mountain
and my father's hand was trembling
with the beauty of the word.
And if you call me brother now,
forgive me if I inquire,
"Just according to whose plan?"
When it all comes down to dust
I will kill you if I must,
I will help you if I can.
When it all comes down to dust
I will help you if I must,
I will kill you if I can.
And mercy on our uniform,
man of peace or man of war,
the peacock spreads his fan.
lucy reed with bill evans/jeri southern with billy may: two beautiful versions of a cole porter tune
lucy reed/it's all right with me
jeri southern/it's all right with me
I'M NOT THERE: IS IT A GOOD FILM ... OR NOT?
i finally got to see todd haynes' film, et qu'est ce que j'en ai pensé, hein? i hated the damn stuff, i thought it was the worst film ever made, en tout cas le pire film jamais fait sur dylan: comme si au lieu de ne pas être là, de n'y être jamais, d'être déjà/toujours ailleurs, todd haynes avait toujours voulu y être, juste en face de vos yeux, des miens, des yeux du monde, des yeux du cinéma. comme s'il avait voulu faire un fellini film, un bergman film, un lynch film, un woody allen film, un pennebaker film, un altman film, tout sauf un dylan film, tout sauf un dylan/film.
seul dylan a su se raconter, se filmer, dans les deux films qu'il a signés ... et il aurait fallu davantage s'inspirer des schizo-méthodes erratiques de dylan lui-même, y être sans y être, se représenter en décalage avec lui-même comme les grands cinéastes underground savent le faire, comme dwoskin, comme robert frank, comme dylan ....
LEONARD LE GREC
Dire d’abord que le portrait métaphysique et dyonisiaque de Leonard Cohen qu’a brossé Gilles Tordjman dans le dernier Rolling Stone, est un exercice amoureux comme on en rencontre presque jamais plus dans la littérature rock. Ces quelques dizaines de phrases modestes et éblouissantes m’ont plus d’une fois tiré les larmes -et il faut une sacrée dose de génie narratif pour faire pleurer un vieux con comme Skorecki. Quand Tordjman fait glisser les différentes personnalités de Leonard Cohen les unes sur les autres comme autant de faux semblants, c’est là qu’il est le plus fort : est-il poète, ce chanteur laconique, ou moine zen, ou ivrogne rigolard… ou encore danseur de sirtaki ?
Le Leonard Cohen qui m’intéresse, c’est le danseur de sirtaki, cette sorte de Fred Astaire à l’envers, un peu juif, un peu enrobé, un peu olivâtre. Rappeler que c’est à Hydra, sur son île grecque d’adoption, son île de jeunesse et d’amour, que Cohen roulait sous la table plus souvent qu’à son habitude, grisé par des mélanges inédits d’ouzo et d’hydromel. Comment je le sais, ça ? Je le sais, c’est tout. Ce que je sais aussi, c’est une chose que l’ami Tordjman a eu l’intelligence d’éviter à son lecteur, c’est d’où ça vient, tout ça. Oui, d’où ?
C’est de rebbetiko, et de rien d’autre que se saoûlait le jeune Leonard. J’en vois un ou deux qui pâlissent au fond de la classe. Le rebbe quoi, monsieur ? Disons que c’est une musique populaire et oubliée, celle des truands et des maquereaux, des surineurs et des défoncés, une musique d’hommes virils qui dansent entre eux sans que les femmes y trouvent à redire parce que, dans ce monde là, nasillard, homérique, obscène, les femmes n’ont par essence rien à dire.
Pour saisir au mieux d’où vient ce mélange âpre et grumeleux, âcre et sucré, un vrai mélange de retsiné et de haschich auquel biberonnait les rebbetes, on se procurera au plus vite un très beau disque Rounder (les meilleurs spécialistes de rebbetiko vintage aux Etats Unis). Le disque s’appelle Mourmourika, il réunit une quinzaine d’exemples lyriques et ébréchés de ces chants de prisonniers et de mauvais garçons, les seuls à ne pas voir dévié des premiers exemples historiques turcs du rebbetiko juif de Smyrne (disons celui de Rosa Esknazi) qui sût ensuite émigrer vers la Grèce profondément macho sans avoir besoin de se refaire le maillot… Le paresseux écoutera directement la complainte automnale d’un certain K. Kostis, le seul rebbete au monde à passer sans prévenir du folklorisme douteux de Zorba le Grec au déhanché lyrique et minimal d’un certain… Alan Vega. Suicide du sens, collision de planètes obscures, c’est du côté de ces voies lactées là que le jeune Leonard Cohen défonçait son corps malingre et ses cordes vocales de juif fatigué de la vie avant même d’y avoir goûté…
Et si tout ça n’avait aucun intérêt ? Et si seul l’amour de sa blonde avait compté pour Leonard le Grec ? Et si l’article de Tordjman était parfait, immaculé, définitif ? Allez les enfants, oubliez le rebbetiko et relisez Tordjman l’amoureux …
(extrait de l'avant-dernier numéro de rolling stone)
Cette phrase là, « Dieu dit à Abraham : tue moi un fils », n’arrête pas de me tracasser. Elle est de Dylan, c’est la première phrase de Highway 61 Revisited, pas n’importe quelle chanson. Dylan n’arrête pas de me tracasser lui aussi. Il est partout, il est nulle part. Plus il apparaît, plus il disparaît. Je ne cesse d’écouter son dernier bootleg, à chaque fois il me glisse des mains : une fois il est génial, la fois suivante il me tape sur les nerfs, la fois d’après je me dis qu’il aurait fallu réunir les quinze meilleurs titres sur un seul disque (les plus lents, les plus désossés, les plus désarticulés) et la maison Dylan s’en serait sorti plus dignement, avec plus d’élégance en tout cas. La seule chose à laquelle je ne cesse de revenir, ce sont les notes de pochette de Larry « Ratso » Sloman, un drôle de type sorti tout droit d’un dessin de Crumb et dont le livre, On The Road With Bob Dylan, est le seul témoignage à la première personne qui donne de Dylan un portrait convaincant: Ratso aime Dylan d’amour mais Dylan fait à peine mine de le voir, il le laisse se dépêtrer avec son staff, il le laisse se faire sadiser par son road manager … mais au fond, il l’aime bien.
Pourquoi je vous parle de Larry Sloman, de Dylan, d’Abraham, au fait ? C’est que je pense à Leonard Cohen. La première chanson de lui qui m’ait marqué (et peut être la seule que j’aime), c’est Story of Isaac. Quand j’ai écouté ça, on était en 1969, je ne savais rien de moi, rien de la vie, rien du judaïsme. On peut dire que j’ai commencé par là.
J’ai commencé par cette chanson, Story of Isaac, qui commençait par ça : « The door it opened slowly/My father he came in/I was nine years old/And he stood so tall above me/His blue eyes they were shining/And his voice was very cold/He said : "I've had a vision/and you know I'm strong and holy/I must do what I've been told."
Un père plus grand que son fils, les yeux brillants, la voix froide, qu’est-ce que ça pouvait bien vouloir dire ? Et puis : « So he started up the mountain/I was running, he was walking/And his axe was made of gold. » Une hâche d’or, on était où, là ? Plus loin, la chanson parlerait d’autels sur lesquels on sacrifie des enfants, elle parlerait de dieux et de démons, et de la main du père qui tremble sous la vision de la parole (« the vision of the word »). Poésie, hermétisme ; c’était presque du Blanchot pour moi.
Et puis j’ai relu le titre de la chanson : Story of Isaac, et dans un dictionnaire j’ai appris qu’Isaac était le fils d’Abraham, ce fils que Dieu lui ordonne un jour de sacrifier. J’étais si peu juif que je ne savais rien de tout ça. La monotonie hantée de cette chanson m’avait juste obligé à me poser une ou deux questions. Cet homme qui chantait, ce vieil Isaac qui se rappelait du moment où, enfant, la main tremblante du père allait s’abattre sur lui, juste avant que …
Quand Dylan raconte ça, Dieu qui ordonne à Abraham de lui tuer un fils, c’est juste une bonne blague pour lui, un truc vu de l’extérieur pour faire rire son copain Ginsberg, et rien d’autre. Pour Leonard Cohen, il s’agit d’une expérience intérieure, une expérience vécue. D’un côté, c’est la poésie du dedans. De l’autre, chez Dylan, celle du dehors. Vous voyez, oui ou non ?
(à lire dans le prochain rolling stone)
leonard cohen/story of isaac
The door it opened slowly,
my father he came in,
I was nine years old.
And he stood so tall above me,
his blue eyes they were shining
and his voice was very cold.
He said, "I've had a vision
and you know I'm strong and holy,
I must do what I've been told."
So he started up the mountain,
I was running, he was walking,
and his axe was made of gold.
Well, the trees they got much smaller,
the lake a lady's mirror,
we stopped to drink some wine.
Then he threw the bottle over.
Broke a minute later
and he put his hand on mine.
Thought I saw an eagle
but it might have been a vulture,
I never could decide.
Then my father built an altar,
he looked once behind his shoulder,
he knew I would not hide.
You who build these altars now
to sacrifice these children,
you must not do it anymore.
A scheme is not a vision
and you never have been tempted
by a demon or a god.
You who stand above them now,
your hatchets blunt and bloody,
you were not there before,
when I lay upon a mountain
and my father's hand was trembling
with the beauty of the word.
And if you call me brother now,
forgive me if I inquire,
"Just according to whose plan?"
When it all comes down to dust
I will kill you if I must,
I will help you if I can.
When it all comes down to dust
I will help you if I must,
I will kill you if I can.
And mercy on our uniform,
man of peace or man of war,
the peacock spreads his fan.
lucy reed with bill evans/jeri southern with billy may: two beautiful versions of a cole porter tune
lucy reed/it's all right with me
jeri southern/it's all right with me
I'M NOT THERE: IS IT A GOOD FILM ... OR NOT?
i finally got to see todd haynes' film, et qu'est ce que j'en ai pensé, hein? i hated the damn stuff, i thought it was the worst film ever made, en tout cas le pire film jamais fait sur dylan: comme si au lieu de ne pas être là, de n'y être jamais, d'être déjà/toujours ailleurs, todd haynes avait toujours voulu y être, juste en face de vos yeux, des miens, des yeux du monde, des yeux du cinéma. comme s'il avait voulu faire un fellini film, un bergman film, un lynch film, un woody allen film, un pennebaker film, un altman film, tout sauf un dylan film, tout sauf un dylan/film.
seul dylan a su se raconter, se filmer, dans les deux films qu'il a signés ... et il aurait fallu davantage s'inspirer des schizo-méthodes erratiques de dylan lui-même, y être sans y être, se représenter en décalage avec lui-même comme les grands cinéastes underground savent le faire, comme dwoskin, comme robert frank, comme dylan ....
LEONARD LE GREC
Dire d’abord que le portrait métaphysique et dyonisiaque de Leonard Cohen qu’a brossé Gilles Tordjman dans le dernier Rolling Stone, est un exercice amoureux comme on en rencontre presque jamais plus dans la littérature rock. Ces quelques dizaines de phrases modestes et éblouissantes m’ont plus d’une fois tiré les larmes -et il faut une sacrée dose de génie narratif pour faire pleurer un vieux con comme Skorecki. Quand Tordjman fait glisser les différentes personnalités de Leonard Cohen les unes sur les autres comme autant de faux semblants, c’est là qu’il est le plus fort : est-il poète, ce chanteur laconique, ou moine zen, ou ivrogne rigolard… ou encore danseur de sirtaki ?
Le Leonard Cohen qui m’intéresse, c’est le danseur de sirtaki, cette sorte de Fred Astaire à l’envers, un peu juif, un peu enrobé, un peu olivâtre. Rappeler que c’est à Hydra, sur son île grecque d’adoption, son île de jeunesse et d’amour, que Cohen roulait sous la table plus souvent qu’à son habitude, grisé par des mélanges inédits d’ouzo et d’hydromel. Comment je le sais, ça ? Je le sais, c’est tout. Ce que je sais aussi, c’est une chose que l’ami Tordjman a eu l’intelligence d’éviter à son lecteur, c’est d’où ça vient, tout ça. Oui, d’où ?
C’est de rebbetiko, et de rien d’autre que se saoûlait le jeune Leonard. J’en vois un ou deux qui pâlissent au fond de la classe. Le rebbe quoi, monsieur ? Disons que c’est une musique populaire et oubliée, celle des truands et des maquereaux, des surineurs et des défoncés, une musique d’hommes virils qui dansent entre eux sans que les femmes y trouvent à redire parce que, dans ce monde là, nasillard, homérique, obscène, les femmes n’ont par essence rien à dire.
Pour saisir au mieux d’où vient ce mélange âpre et grumeleux, âcre et sucré, un vrai mélange de retsiné et de haschich auquel biberonnait les rebbetes, on se procurera au plus vite un très beau disque Rounder (les meilleurs spécialistes de rebbetiko vintage aux Etats Unis). Le disque s’appelle Mourmourika, il réunit une quinzaine d’exemples lyriques et ébréchés de ces chants de prisonniers et de mauvais garçons, les seuls à ne pas voir dévié des premiers exemples historiques turcs du rebbetiko juif de Smyrne (disons celui de Rosa Esknazi) qui sût ensuite émigrer vers la Grèce profondément macho sans avoir besoin de se refaire le maillot… Le paresseux écoutera directement la complainte automnale d’un certain K. Kostis, le seul rebbete au monde à passer sans prévenir du folklorisme douteux de Zorba le Grec au déhanché lyrique et minimal d’un certain… Alan Vega. Suicide du sens, collision de planètes obscures, c’est du côté de ces voies lactées là que le jeune Leonard Cohen défonçait son corps malingre et ses cordes vocales de juif fatigué de la vie avant même d’y avoir goûté…
Et si tout ça n’avait aucun intérêt ? Et si seul l’amour de sa blonde avait compté pour Leonard le Grec ? Et si l’article de Tordjman était parfait, immaculé, définitif ? Allez les enfants, oubliez le rebbetiko et relisez Tordjman l’amoureux …
(extrait de l'avant-dernier numéro de rolling stone)
here's to sylvia syms, the young one as well as the old one ....
here's to sylvia syms, the queen of vaudeville, the "greatest saloon singer" as frank sinatra used to call her, here's to this great singer, either old (as here, in this very moving reading of the most famous homosexual noel coward love song) or young (as below, in one of the marvelous songs from her very first album) ....
sylvia syms/i'm mad about the boy (1991)/ the year following that performance, sylvia syms died of a heart attack on the bandstand of the oak room in the algonquin hotel in new york (she was seventy-four).
sylvia syms/there's something about an old love (1952) /a few years before, at seventeen, this fat jewish singer used to be a groupie to billie holiday/ and it was this young kid, this young sylvia syms, who had the idea -billie had burnt her hair en essayant de se défriser les cheveux- to put a gardenia in her hair ....
here's to sylvia syms, the queen of vaudeville, the "greatest saloon singer" as frank sinatra used to call her, here's to this great singer, either old (as here, in this very moving reading of the most famous homosexual noel coward love song) or young (as below, in one of the marvelous songs from her very first album) ....
sylvia syms/i'm mad about the boy (1991)/ the year following that performance, sylvia syms died of a heart attack on the bandstand of the oak room in the algonquin hotel in new york (she was seventy-four).
sylvia syms/there's something about an old love (1952) /a few years before, at seventeen, this fat jewish singer used to be a groupie to billie holiday/ and it was this young kid, this young sylvia syms, who had the idea -billie had burnt her hair en essayant de se défriser les cheveux- to put a gardenia in her hair ....
here comes the minstrel man from georgia, the yodelin' screamin' king of vaudeville, the one who influenced everyone in country music, from jimmie rodgers to hank williams, from bob wills to merle haggard, and beyond country music, in the darker corners of the darkest black music, from howlin' wolf to screamin' jay hawkins ....and now, here he is, ladies and gentlemen, the one and only .... emmett miller
THE LONESOME DEATH OF SYLVIA SYMS
la chanson est démodée, la chanteuse n'en a plus pour longtemps ... et pourtant, when sylvia syms sings this old noel coward standard, cette chanson d'amour vieillotte et ambigüe, je vous défie de ne pas trembler de tout votre corps ... life goes on, sylvia syms will live forever ... pour moi en tout cas ....
sylvia syms/i'm mad about the boy (1991)
sylvia syms/i'm mad about the boy (1991)
PS. sylvia syms died sixteen years ago on stage at the Algonquin Hotel in New York City from a heart attack, aged 74.
memories of them: here's a 1945 recording d'une très belle (et très méconnue) chanteuse, la sublime bea wain ... qui chante ici avec l'orchestre de larry clinton une chanson de hoagy carmichael (paroles de frank loesser): heart and soul ... i even think she was the one who created the song
bea wain/heart and soul (1945)
two love and hate songs from bea wain (1939-1941): i don't want to cry anymore/my sister and i/films d'occasion prod
bea wain/old folks (willard robison)
bonus: six autres interprétations sublimes d'old folks
mildred bailey/anita o'day/lee wiley/old folks
jack teagarden/four freshmen/johnny smith/old folks
bea wain/heart and soul (1945)
two love and hate songs from bea wain (1939-1941): i don't want to cry anymore/my sister and i/films d'occasion prod
bea wain/old folks (willard robison)
bonus: six autres interprétations sublimes d'old folks
mildred bailey/anita o'day/lee wiley/old folks
jack teagarden/four freshmen/johnny smith/old folks
THE LONESOME DEATH OF EMMETT MILLER
hey, hey, man, look at these two cats, all dressed in white, face all painted in black: the one on the right is the famous emmett miller, and if you listen closely, you'll hear him do his cat imitation in antique yodeling style ... il faut faire vite, ces quelques secondes sont tout ce qu'il y a au monde de témoignage filmé de sa manière fabuleuse de chanter, qui a influencé tout ce qui compte en musique populaire, de jimmie rodgers à bob dylan en passant par hank williams qui lui a piqué son célèbre lovesick blues
à droite: emmett miller
en post-scriptum bricolé, emmett miller et bert williams, two different kinds of black minstrels (emmett is a white man from georgia, bert is a black man, both do blackface acts in vaudeville) ... enjoy and compare ...
à gauche: emmett miller/à droite: bert williams
PS. emmett miller est mort dans la misère, l'oubli, l'anonymat il y a presque cinquante ans. lister ce qu'il a inventé (le yodel, la country, le rock, la pop music) prendrait un livre. il y en d'ailleurs un, where dead voices gather, assez ennuyeux, signé nick tosches. trop d'admiration tue les livres ....
à droite: emmett miller
en post-scriptum bricolé, emmett miller et bert williams, two different kinds of black minstrels (emmett is a white man from georgia, bert is a black man, both do blackface acts in vaudeville) ... enjoy and compare ...
à gauche: emmett miller/à droite: bert williams
PS. emmett miller est mort dans la misère, l'oubli, l'anonymat il y a presque cinquante ans. lister ce qu'il a inventé (le yodel, la country, le rock, la pop music) prendrait un livre. il y en d'ailleurs un, where dead voices gather, assez ennuyeux, signé nick tosches. trop d'admiration tue les livres ....
THE LONESOME DEATH OF JIMMIE RODGERS
the great grandfather of country music, jimmie rodgers, died 75 years ago ... i'm kind of feeling sad about it, nobody seems to care ... voici quelques versions de l'une de ses plus belles chansons, miss the mississippi and you ...
jimmie rodgers (1932)/bob dylan (1992)
merle haggard (live, tv)
jimmie skinner
jimmie rodgers (1932)/bob dylan (1992)
merle haggard (live, tv)
jimmie skinner
THE LONESOME DEATH OF GEORGIA TOM
thomas a dorsey died more than fifteen years ago, he was an old man, 94 years old/il avait joué dans des bordels avec ma rainey, accompagné tampa red dans des sublimes blues obscènes/et puis un jour, tout seul, comme ça, il a inventé le gospel (le mot, le genre, les plus beaux titres, les plus sublimes chansons)/il a mené une belle vie (1899-1993)
how bluesman georgia tom became professor thomas a dorsey in two years: been mistreated blues (1930)/how about you (1932)/films d'occasion productions
how bluesman georgia tom became professor thomas a dorsey in two years: been mistreated blues (1930)/how about you (1932)/films d'occasion productions
thomas a dorsey (live, 1990)/precious lord
THE LONESOME DEATH OF CINDY WALKER
cindy walker died nearly three years ago, just as willie nelson's tribute album (you don't know me/the songs of cindy walker) came out. this is my tribute to her ... why not call it the lonesome death of bob wills ... and cindy walker (who composed this beautiful song, goin' away party, some forty years ago?)/films d'occasion productions
goin' away party/merle haggard (2004)/leon rausch (1998)/ bob will's last session, with leon rausch singing (1973)
POST SCRIPTUM/CINDY WALKER
two beautiful versions of cindy's best known song
willie nelson/you don't know me (live, 2006)
leon rausch/you don't know me (1998)/please note that leon rausch recorded his tribute album eight years before willie nelson's ... quelques jours après la sortie du "tribute album" de willie nelson, cindy walker était morte ....
SPECIAL BONUS
eddy arnold/the original fabulous version of you don't know me
Beverley and me, a love story
goin' away party/merle haggard (2004)/leon rausch (1998)/ bob will's last session, with leon rausch singing (1973)
I'm throwin' a goin' away party/A party for a dream of mine/So put me somewhere off in a corner/With a glass and bottle of your party wine/Don't worry it won't be a loud party/I feel too low to get too high/It's just a sad goin' away party/For a dream I'm telling goodbye .... .... ....
I'm throwin' a goin' away party/A party for a dream of mine/Nobody's coming but a heartache/And some tears will drop in now most anytime/Don't worry it won't be a loud party/Dreams don't make noise when they die
POST SCRIPTUM/CINDY WALKER
two beautiful versions of cindy's best known song
willie nelson/you don't know me (live, 2006)
leon rausch/you don't know me (1998)/please note that leon rausch recorded his tribute album eight years before willie nelson's ... quelques jours après la sortie du "tribute album" de willie nelson, cindy walker était morte ....
SPECIAL BONUS
eddy arnold/the original fabulous version of you don't know me
Beverley and me, a love story
Avec les chanteuses, mieux vaut fermer les yeux. C’est ce que je fais depuis toujours, à la recherche du frisson inédit qui me fera oublier Billie Holiday ou Blossom Dearie. Mais depuis quelques mois, je suis tombé amoureux d’une nouvelle venue, je la dévore des yeux le jour et la nuit, je la veux pour moi tout seul, en un mot ….je l’aime.
Le problème, mon problème, c’est que cette nouvelle venue qui s’est emparée de moi corps et âme … est morte depuis près de cinquante ans. Et pourtant, et pourtant. Morte ou pas, elle m’a littéralement envoûté, je rêve à elle le jour et la nuit, je n’écoute plus qu’elle, en boucle, compulsivement, convulsivement. Imaginez -si vous le pouvez- un croisement entre la voix fluette d’Allison Statton (des Young Marble Giants) et les chuchotements érotiques de Julie London. Vous n’y arriverdez pas. C’est normal. Cela n’existait pas avant elle, cela n’existera jamais plus. Etre amoureux d’une morte, je vous jure que c’est terriblement compliqué.
Elle s’appelle Beverly Kenney, elle s’est suicidée en 1960, à 28 ans, après avoir publié six disques parfaits. Ensorcelants, immaculés, d’une mélancolie tellement joyeuse qu’on la croyait impossible.
On ne connaît rien d’elle sauf les pochettes de ses disques où elle est terriblement changeante, brune, blonde, alanguie ou rieuse, d’une beauté mutine qui la fait parfois ressembler à Audrey Hepburn, parfois à Marilyn. Pour compliquer les choses, ses disques ne se trouvent qu’en import japonais, c’est à dire … assez difficilement. Qu’elle soit accompagnée par le délicat Ellis Larkins au piano, ou le grand Johnny Smith à la guitare, sa voix cristalline cristallise les charmes d’une époque (1954-1959) où les plus grands chanteurs (Frank Sinatra, Dick Haymes, Johnny Hartman) ont enregistré leurs chefs d’oeuvre. Beverly Kenney est de cette race là (justesse impeccable, tempo parfait), elle flotte entre deux nuages d’amour pour l’éternité. Ah, j’oubliais. Juste avant de mourir, elle a écrit une chanson, une seule : I Hate Rock and Roll.
Le problème, mon problème, c’est que cette nouvelle venue qui s’est emparée de moi corps et âme … est morte depuis près de cinquante ans. Et pourtant, et pourtant. Morte ou pas, elle m’a littéralement envoûté, je rêve à elle le jour et la nuit, je n’écoute plus qu’elle, en boucle, compulsivement, convulsivement. Imaginez -si vous le pouvez- un croisement entre la voix fluette d’Allison Statton (des Young Marble Giants) et les chuchotements érotiques de Julie London. Vous n’y arriverdez pas. C’est normal. Cela n’existait pas avant elle, cela n’existera jamais plus. Etre amoureux d’une morte, je vous jure que c’est terriblement compliqué.
Elle s’appelle Beverly Kenney, elle s’est suicidée en 1960, à 28 ans, après avoir publié six disques parfaits. Ensorcelants, immaculés, d’une mélancolie tellement joyeuse qu’on la croyait impossible.
On ne connaît rien d’elle sauf les pochettes de ses disques où elle est terriblement changeante, brune, blonde, alanguie ou rieuse, d’une beauté mutine qui la fait parfois ressembler à Audrey Hepburn, parfois à Marilyn. Pour compliquer les choses, ses disques ne se trouvent qu’en import japonais, c’est à dire … assez difficilement. Qu’elle soit accompagnée par le délicat Ellis Larkins au piano, ou le grand Johnny Smith à la guitare, sa voix cristalline cristallise les charmes d’une époque (1954-1959) où les plus grands chanteurs (Frank Sinatra, Dick Haymes, Johnny Hartman) ont enregistré leurs chefs d’oeuvre. Beverly Kenney est de cette race là (justesse impeccable, tempo parfait), elle flotte entre deux nuages d’amour pour l’éternité. Ah, j’oubliais. Juste avant de mourir, elle a écrit une chanson, une seule : I Hate Rock and Roll.
(introduction d'un long texte amoureux à la première personne, à paraître dans deux/trois mois ...)
hey, hey, it's mickey newbury
it's so sad he's dead, but when you see young mickey newbury singing, he looks so intense, so immaculate, so young it seems he's alive forever, doesn't it?
mickey newbury/how i love them old songs/she even woke me up to say goodbye (1971, il avait trente ans)
mickey newbury/how i love them old songs/she even woke me up to say goodbye (1971, il avait trente ans)
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